Rencontre avec le designer graphique Alain Bourdon. By Marthe Viallet
Le fluo vu par un designer graphique de qualité
Ou comment redonner au fluo ses lettres d’or…
Contexte: Coup de cœur du blog français du fluo pour une affiche fluo dans le métro parisien.
L’objet de cette affiche: Le festival international jeune création en art numérique 2014
Date: Exposition du 26 au 30 novembre 2014
Lieu:Issy-les-Moulineaux
Alain Bourdon, designer graphique depuis 2008, a conçu l’affiche tout en fluo du Festival de l’art numérique qui s’est tenu à Issy-les-Moulineaux du 26 au 30 Novembre 2014. Le Blog français du fluo a eu un coup de cœur. Je suis allée à sa rencontre, il a accepté de répondre à mes questions.
Qu’est ce qui amène un designer graphique à utiliser le fluo aujourd’hui ?
Revenons d’abord sur son parcours…
«J’ai toujours su dessiner» reconnaît Alain Bourdon, avec simplicité. Ce don qui sonne pour lui comme une évidence a été le point de départ de sa carrière de graphiste. Le bac en poche, il intègre une prépa en école d’art qui le mène avec succès à l’Ecole nationale supérieure des Arts Décoratifs (ENSAD).
Il se spécialise en graphisme et multimédia. Une spécialité qui ne le limite pas, puisqu’il met un point d’honneur à élargir son horizon. Il travaille ainsi dans d’autres secteurs comme l’espace ou le son et collabore avec des scénographes et des acousticiens. « Le travail de designer graphique reste un travail global où l’on se nourrit des autres secteurs », confie Alain Bourdon. « Il y a un pont entre l’image et l’espace »
Diplômé en 2008, le jeune graphiste est aussitôt recruté dans une agence de communication. Mais très vite « des questions d’éthique, de hiérarchie et d’intérêt porté aux sujets travaillés » le poussent à quitter l’agence. Il se lance en free-lance.
Cette liberté trouvée, il commence à créer de beaux livres. Ces travaux le font toucher pour la première fois au fluo. Un « rose fluo calme » qui orne un ouvrage consacré à Yves Saint-Laurent, paru en 2009, et qui prouve que ces tons ne sont pas incompatibles avec le luxe. « LA COLLECTION YVES SAINT LAURENT PIERRE BERGE – La vente du siècle » est ce livre de 2009 dont une partie du titre et les pages de garde sont rose fluo (Christiane de Nicolay-Mazery (auteur) – Flammarion (édition)).
Le projet cube et son affiche fluo
La couleur n’est pas sans rappeler celle de sa récente affiche pour le deuxième festival de l’art numérique. Car jusqu’à aujourd’hui, Alain Bourdon n’a plus utilisé le fluo dans son travail. Il aura fallu ce dernier challenge lancé par le « Cube » et relevé haut-la-main, pour que le designer se réapproprie le fluo.
Le cube, c’est un centre d’art numérique qui organise depuis 2013 un festival international récompensant la jeune création en art numérique. En 2013, pour la première édition du festival, Alain Bourdon avait dû remplir deux missions : concevoir l’identité graphique du logo du centre (identité pérenne) mais aussi celle du festival. Une mission qu’il avait accompli avec succès à coup de noir, bleu et pantone or.
Nous sommes bien loin de notre couleur pétante. Quoique…
Un an plus tard, Alain Bourdon délaisse les couleurs sobres et chics, qu’il apprécie particulièrement, pour un pantone 805 C. Le fluo rose orangé qui caractérise cette belle affiche. Pourquoi ce choix ?
« En 2014, il fallait une similitude avec 2013, tout en étant complètement différent, c’était ça la commande ! », nous explique-t-il. C’est donc pour créer une rupture avec l’affiche de 2013 et ses tons beaucoup plus discrets, qu’il pense au fluo. Mais à l’époque rien n’est gagné. Alain nous confie que les organisateurs du festival lui ont demandé plusieurs fois s’il était sûr de ce choix chromatique. Lui en était convaincu. « Il le fallait car l’affiche était destinée à être dans la rue et dans le métro, et il fallait donc qu’elle soit visible. D’autant que le projet n’en est qu’à ses débuts, raconte-t-il. En outre, le fluo semblait selon lui parfaitement adapté à l'art numérique et la jeune création.
Un logo qui vit
Pour concevoir son affiche, Alain Bourdon imagine donc un logo qui vit, qui puisse évoluer en fonction du support, de l’année, de la saison, loin d’un signe graphique estampillé sur chaque support. Il propose alors ce cube en transparence avec de la lumière et crée volontairement des zones de respiration. « J’ai voulu montrer que le Cube organise le festival et qu’en même temps le festival dialogue avec le Cube, les deux sont imbriqués, ce sont deux identités indépendantes et complémentaires. »
Du fluo pour la suite ?
En dehors de ces quelques réalisations fluotées et osées, Alain Bourdon aime rappeler qu'il est très "noir et blanc". En atteste d'ailleurs son allure chic et parisienne du moment.Et quand il est prêt à faire des concessions comme pour l'art numérique, c'est parce que le sujet traité l'embarque dans cette direction. Jamais l'inverse. Par ailleurs, il réserve ces choix audacieux à des créations plus temporaires que pérennes. "Les gens ont peur du fluo", affirme-t-il en souriant. Pour certains, c'est un parti pris agressif, c'est très franc comme couleur."
Avant de me confier dehors : "C'est vrai Marthe que la majorité des gens qu’on voit sont en habillés noir ».
Et moi de lui rétorquer au moment de le quitter : N’oublie pas le fluo !
Marthe Viallet
Merci à Elisabeth Scherrer, journaliste, pour son aide précieuse.
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